Avant d'être un film, L'emmerdeur était un succès de boulevard : Le contrat, qui raconte les tribulations d'un honnête homme éploré, dont la quête d'affection va compromettre la mission d'un tueur à gages.
Le contrat, c'est celui que doit réaliser Ralph dit "Le Milan", un tueur à gages taciturne interprété ici par Lino Ventura. Mais son chemin va croiser celui de Pignon, joué par Jacques Brel, un dépressif en quête d'amitié, qu'il sauve in extremis du suicide.
JT de 20h00 : tournage de l'emmerdeur, 1973
Sur le tournage, le chanteur devenu acteur évoque son personnage : "C'est un con ! C'est un brave con mais c'est un con !" Un rôle de composition mais "pas de A à Z" avoue-t-il en souriant.
Le journaliste demande ensuite à Edouard Molinaro comment il parvient à faire rire avec Lino Ventura ? Le réalisateur explique que : "Le comique s'il vient, ne vient jamais du désir des comédiens de faire rire, mais simplement de l'exploitation de situations. Ni Lino Ventura, ni Jacques Brel ne jouent comique dans le film. Ils jouent normalement, ils jouent tragique, même quand la situation l'impose, ou réaliste en tout cas. C'est un film absolument sans gag, sans sourire de la part des comédiens".
Lino Ventura, clope en main, revient sur son personnage avec le journaliste. Un personnage dont il a l'habitude : un dur, facile de la gâchette. Impassible, il déclare : "Oui, mais c'est comique, ce qui change pas mal de choses. C'est pour ça que je l'ai fait d'ailleurs". Il concède que le comique lui permet de sortir de cette étiquette de dur qui lui colle à la peau : "Je crois que tout le monde a besoin de sortir de l'étiquette qu'on lui met sur le dos. Faire un film comique, c'est quelque chose qui me plaisait. J'avais envie de le faire, alors ça tombe bien".
Jacques Brel "L'Emmerdeur"
1973 - 02:01 - vidéo
Toujours sur le tournage, Edouard Molinaro évoque la façon de jouer de Jacques Brel : "Jacques est un collaborateur très précieux, non pas dans la mesure où il décide d'apporter ses idées, mais dans la mesure où il essaye de prolonger les miennes. Il essaye de m'aider, en tant que réalisateur, d'aller plus loin dans mes propres désirs. Ça c'est très précieux".
Jacques Brel disserte quant à lui sur le rêve, le désir, le besoin et le projet : "J'ai des petits rêves. Le rêve, c'est quand c'est supportable à l'idée de rêve. C'est une envie. Et dès que ça devient un besoin : c'est un projet. On ne se contente plus de rêver une chose, dès qu'il faut qu'elle se matérialise pour que ce soit supportable à vivre, alors il faut absolument que cela devienne un projet. Il faut s'en occuper de ses rêves ! Sans quoi, on devient infirme. C'est comme pour tout : il faut aller voir. Et une fois qu'on a vu. Il faut aller voir ailleurs. Dans la vie, je vais voir. Je ne dis pas que je vois bien où il faut aller voir, mais je vais voir".
Le journaliste l'interroge : "Et en général quand vous avez vu ?" Le regard intense, il rétorque : "J'oublie tout, tout de suite. Finalement ce qui est le plus fort chez moi, c'est l'envie d'aller voir".
Le journaliste souligne que : "Ça peut aussi s'appeler une fuite en avant ça !" L'acteur confirme : "oui, oui, ça s'appelle comme ça". Il ajoute que cette expression le fait rire car : "c'est un mot qui est employé par des gens qui ne vont pas voir".
Pour aller plus loin
JT 20H00 : Jacques Brel et Lino Ventura sur le tournage de "L'emmerdeur". Scènes de tournage du film "L'emmerdeur" de Edouard Molinaro. Ce dernier évoque le caractère de Brel qui va au bout des choses et de Lino Ventura, très pudique qu'il faut apprivoiser. Les deux acteurs principaux s'évoquent mutuellement (21 avril 1973)
Nord Actualités : sortie du "L'Emmerdeur" au cinéma. (17 octobre 1973)