L'ACTU.
Le printemps 2025 devrait voir le retour (expérimental) de la consigne dans certaines régions et certains commerces. Le principe est simple et familier aux anciens : une consigne va s'appliquer lors de l'achat d'une bouteille ou d'un bocal en verre. Une petite somme (entre 20 ou 30 centimes) qui sera récupérée au moment où l'on rapporte le contenant. Il pourra alors être réutilisé après avoir été trié, lavé et renvoyé au producteur. Il s'agit donc d'une pratique vertueuse réalisée en local.
Pour réduire l’impact environnemental des emballages, l’objectif est d’atteindre 10% de bouteilles et de bocaux en verre réemployés d’ici à 2027, conformément à la loi Agec sur l’économie circulaire de février 2020.
Très courante autrefois, la consigne a été abandonnée à cause de nos nouvelles habitudes de consommation. Le montage d'archives proposé en tête d'article revient sur la disparition de la consigne à partir des années 1970.
LES ARCHIVES.
Une bouteille en verre utilisée puis rendue contre quelques francs pour être réutilisée, et ce, jusqu’à 40 fois. C’était le principe du verre consigné. Mais avec les années 60 débute une nouvelle ère : celle du prêt à consommer… et à jeter.
« Il me paraît impensable de revenir à la calèche ou à la bicyclette à 100 %, par conséquent, je ne crois pas qu’on puisse imaginer de revenir tous azimuts à la consignation », précise un fabricant de bouteilles dans une archive de 1974. « L’emballage perdu » comme on l'appelle alors gagne du terrain dans les ménages. « Moi, je suis pour le verre perdu parce que je suis une femme qui travaille et je n'ai pas le temps », déclare une consommatrice la même année.
En verre ou en plastique, le contenant perdu conquiert les fabricants de bouteilles. La consigne est désormais snobée par le progrès, et par les consommateurs. Le verre perdu, lui, est recyclé, donc récupéré, broyé, fondu pour devenir une nouvelle bouteille. Le procédé est quinze fois plus énergivore que la consigne et le nettoyage qui va avec. Mais qu'à cela ne tienne, il gagne du terrain.
De juteux profits pour les lobbys
En 1980, l’OCDE préconise pourtant déjà un retour à la consigne, d’autant qu’il générerait des emplois, mais rien n’y fait. En 1982, une journaliste tient une potentielle explication : « Dans cette affaire, de puissants intérêts sont en jeu qui ont réussi à faire reculer les pouvoirs publics. Des groupes de pression, en ce moment-même, agissent sur la communauté européenne pour imposer leur politique du gaspillage et empêcher tout retour, même modéré, à la consigne. Les consommateurs européens doivent le savoir. »
Sans compter que pour les industriels, l’emballage perdu, c’est tout bénef, comme l'explique ici Yves Domzalski du bureau européen des unions de consommateurs : « Quand ils vous vendent du vin, de l’eau minérale ou de la bière, ils vous vendent non seulement ce produit, mais également un emballage. Un emballage qui coûte cher et que l’on jette à chaque fois. Et très souvent, les fabricants de ces produits sont également des fabricants d’emballages donc de bouteilles. »
L’Alsace se rebelle
Tombée en désuétude, la consigne est officiellement abandonnée en 1999, au profit de l’emballage à usage unique. Une région fait néanmoins de la résistance, dans les grandes surfaces comme dans les petits commerces, c’est l’Alsace.
Yves Zehn, PDG de Coop Alsace précise en 2008 : « Au moment où on parle beaucoup d’environnement, d’écologie, je pense que reprendre le verre, le consigner, c’est se mettre dans cette mouvance. Et au-delà de cet aspect écologique, ça permet de vendre un produit basique comme le vin ou la bière, ça permet de le vendre moins cher. »
Déchets, option consigne. Ces dix dernières années, certains commerces et associations ont remis la pratique au goût du jour. À leur tour, des élus municipaux, des députés et des ministresont envisagé le retour de la consigne pour les bouteilles en verre et même en plastique.
Ce sera chose faite, mais à titre expérimental au printemps 2025. Citeo, entreprise privée spécialisée dans le recyclage des emballages, va piloter l'opération dans quatre régions : les Pays de la Loire, de la Bretagne, de la Normandie et des Hauts-de-France. Ces régions ont été choisies, a expliqué l'entreprise spécialisée dans le recyclage des emballages à nos confrères de francetvinfo: : « notamment en raison de leur dynamisme sur le réemploi, avec des performances de tri largement supérieures à la moyenne. »
Selon les estimations du secteur, le réemploi des bouteilles en verre permet d’économiser 75% d’énergie, 50% d’eau et 79% de CO2.