3 mai 2001. Jacques Chirac évoque pour la première fois son projet de charte de l'environnement. S'appuyant sur le constat du dérèglement climatique, le président Chirac intervient à Orléans sur le thème de l'écologie et de l'environnement. Le chef de l'Etat envisage alors officiellement la mise en place d'une écologie humaniste, et il propose à cet effet la mise en place d'une Charte de l'environnement adossée à la Constitution.
"La protection de l'environnement est devenue un impératif éminemment politique qui concerne la "cité planétaire toute entière". Il s'agit de faire prévaloir une certaine conception de l'homme par rapport à la nature. Il s'agit de rappeler ses droits et aussi ses responsabilités. Il s'agit de définir une éthique collective, inscrire une écologie humaniste au cœur de notre pacte républicain."
Il propose alors une charte de l'environnement dont les principes auraient à terme force de loi.
Le processus va se poursuivre...
Chronologie de la mise en place de la charte
18 mars 2002. Jacques Chirac, candidat à l'élection présidentielle se rend au Mont Saint Michel où il dévoile son projet de politique pour l'environnement et la création d'un ministère spécifique.
29 janvier 2003. Réélu, il poursuit ce projet et organise des assises pour la charte de l'environnement. Accompagné de Roselyne Bachelot et d'Yves Coppens, le président ouvre la première des 14 sessions pour l'élaboration d'une charte de l'environnement. Il évoque le lien entre l'Homme et la Nature et la nécessité de surveiller les modes de production et de consommation. Prenant l'exemple de la marée noire, il réaffirme le principe "pollueur-payeur" et la nécessité de donner une valeur constitutionnelle au droit de l'environnement.
28 février 2003. Le Congrès de Versailles adopte la révision constitutionnelle préalable au référendum européen et la Charte de l'Environnement voulue par Jacques Chirac.
Le président de la République souhaite inscrire le droit à l'environnement dans la Constitution, mais il n'est alors question que d'une charte de l'environnement. En faisant le tour des régions, le gouvernement cherche à recueillir les suggestions des élus et des associations pour rédiger un texte. Une question divise : celle du principe de précaution. Roselyne Bachelot, ministre de l'Environnement, déclare que le principe de précaution ne devait pas empêcher le développement économique. Corinne Lepage, ancienne ministre de l'Environnement, milite contre la suppression du principe de précaution.
Finalement le 25 juin 2003, un projet de charte sur l'environnement est présenté au Conseil des ministres. Il a été rédigé par le Garde des Sceaux Dominique Perben et présenté en conseil de ministres, afin d'être inscrit dans le préambule de la Constitution.
28 février 2005. Au Congrès de Versailles, les parlementaires intègrent la Charte de l'environnement à la Constitution française. Le droit à un environnement sain est désormais élevé au même rang que les droits de L'homme de 1789.
Un an après ce vote peu de choses avaient changé en matière d'environnement...
"C'était il y a un an, le Parlement, réuni en congrès exceptionnel, décidait d'intégrer la Charte de l'environnement à la Constitution française. C'était le vœu de Jacques Chirac. Un an après, quelle était la situation, la charte avait-t-elle modifié réellement la politique en matière d'environnement" ?
Projet de loi sur les OGM, projet de loi sur l'eau. Un an après, selon des associations écologistes, les principes de la Charte attendent toujours d'être appliqués.
Comme le constate alors Arnaud Gossement, juriste à la fédération France Nature Environnement, "le projet de loi sur les OGM ne cite même pas le principe de précaution. Vous avez le projet de loi sur l'eau. Là, ce n'est plus le principe pollueur payeur qui, normalement, est consacré dans la Charte. Là, c'est le principe pollué payeur. Donc, on voit bien que les textes de loi ne sont pas conformes à la Charte. Et sur le terrain, les décisions qui sont prises par les administrations concernées, en ce qui concerne les usines, un certain d'activités susceptibles d'atteindre l'environnement, ne sont pas conformes non plus aux principes qui sont dans la Charte. Donc, ça demeure véritablement un texte. Nous, on demande son application au quotidien".
Emblématique, le projet de loi sur l'eau sera débattu en mai prochain à l'Assemblée. Le principe du pollueur payeur, pourtant esquissé dans la Charte, n'apparaît pas dans ce texte.
Nelly Ollin, ministre de l'Ecologie et du développement durable, conteste cette vision des choses, "je ne pense pas que ce soit de la frilosité de la part des ministères. Je pense qu'un projet de loi doit rester quand même assez ouvert pour que chacun puisse y trouver sa place. Je crois que c'est ça le travail parlementaire. Le projet de loi sur le principe du pollueur payeur est un peu, je dirais, Heuuuuu [long silence] Elle reconnait que "on n'en parle pas beaucoup. Je le dis clairement, je pense que c'est un dossier, c'est un dossier sur lequel il y a énormément de difficultés".
"Si pour le gouvernement, la Charte est encore trop jeune pour que l'on puisse juger de son impact. Certains écologistes soulignent que l'environnement n'est toujours pas une priorité dans notre pays", souligne le commentaire.
Corinne Lepage, présidente de Cap 21 et ancienne ministre de l'Environnement souligne que "tous les textes dans lesquels on peut effectivement porter atteinte à la protection de l'environnement, que ce soit la Loi sur les parcs nationaux, que ce soit la Loi sur les espaces ruraux qui a touché à la loi Littoral et à la montagne, ça a été voté malgré la Charte".
Le commentaire précise que "c'est la justice qui est la première à appliquer la Charte de l'environnement. En avril dernier, le tribunal de Chalons interdisait le Teknival, prévu sur un site classé. Le rassemblement avait été autorisé par le gouvernement. Il a tout de même eu lieu".
Pour aller plus loin
20 heures le journal : Chirac et l'écologie humaniste. S'appuyant sur le constat du dérèglement climatique, le président Chirac intervenait aujourd'hui à Orléans sur le thème de l'écologie et de l'environnement. Le chef de l'Etat envisage une écologie humaniste, et il a proposé une Charte de l'environnement adossée à la Constitution. (Sujet intégral, 3 mai 2001)
12/14 Edition nationale : Yves Coppens et la charte de l'environnement. Yves Coppens, professeur au Collège de France, a collaboré à l'élaboration de la charte, il s'exprime sur le réchauffement climatique et justifie ainsi le projet de charte de l'environnement qu'il préside, et qui doit être ajoutée à la Constitution. Ce texte devait instaurer le principe de précaution au cas où l'homme influerait sur le climat. (18 sept. 2004)
Télématin : Les 4 vérités. Gérard Leclerc reçoit Laurent Fabius, député PS de Seine Maritime pour évoquer le référendum sur la Constitution européenne, l'abstention du PS au vote sur la Charte de l'environnement… "le président est frappé d'une espèce de dédoublement écologique de la personnalité"… (1 mars 2005)
Florence Dartois