Entre 1764 et 1767, une centaine de victimes, essentiellement des femmes et des enfants de la contrée de Gévaudan, périssent sous les crocs d’un mystérieux animal rapidement qualifié de « Bête ». Cette archive de 1977, extraite de l'émission « Il était une fois » relate cette histoire qui défraya la chronique à travers le récit d'Henri Gougaud. Avec son accent chantant, l'écrivain carcassonnais fait le récit truculent de la terreur qui gagna les campagnes et les différentes hypothèses qui couraient à l'époque des faits.
Il raconte comment on parla d'abord d'une meute de loups. Plusieurs battues furent organisées sans succès. Les locaux doutaient de cette version car des témoignages décrivaient un animal invulnérable (des chasseurs l’avaient vu se relever, apparemment sans mal, après avoir reçu des balles). Son audace semblait sans limite, sa cruauté implacable (certaines victimes sont retrouvées décapitées et vidées de leur sang). Ce portrait ne collait pas avec celui du loup qui attaque peu les humains. Dans les campagnes friandes de légendes, on parlait également de loup-garou mais aussi de châtiment divin.
L’affaire devient nationale
Cette affaire régionale allait rapidement prendre une tournure nationale. Face à la psychose grandissante, les autorités locales demandèrent et obtinrent le concours de l’armée royale, qui mit à disposition un détachement de dragons aux ordres du capitaine Duhamel.
Une battue monstre avec 20 000 paysans de la région fut organisée. Rien n’y fit, pire encore, la bête se déplaça plus profondément à l’ouest, continuant à massacrer femmes et enfants. L’animal était signalé dans l’Aubrac et le Rouergue (Aveyron actuel), en Auvergne (département du Cantal) et dans le Velay (la Haute-Loire, aujourd’hui).
La psychose allait encore enfler jusqu'à remonter au puissant roi Louis XIV. Pour venir à bout de la « bête », le monarque décida d'envoyer son propre porte-arquebuse, Antoine de Beauterne, responsable de ses chasses royales. Le 19 septembre 1765, après une ultime battue, Antoine et sa troupe abattaient un grand loup. Ce serait la bête. De fait, les attaques cessèrent après cette dernière chasse. L’envoyé du roi allait rentrer triomphalement à Versailles avec son trophée empaillé qu’il n'allait pas manquer d'exhiber devant le monarque. L’affaire semblait close.
Le monstre réapparaît
Lorsqu’en qu’en décembre 1765, tout allait recommencer. Les victimes se multipliaient. Deux ans plus tard, le 19 juin 1767, un chasseur local prénommé Jean Chastel allait tuer un étrange animal sur les pentes du mont Mouchet. Le procès verbal de l’autopsie de la bête décrit « un loup, mais extraordinaire et bien différent par sa figure et ses proportions que les loups que l’on voit dans ce pays ». Cette fois, les attaques allaient bel et bien cesser définitivement : le Gévaudan était enfin délivré du prédateur sanguinaire.
En trois ans, la bête aura fait une centaine de victimes - le décompte variant selon les auteurs - de 85 à plus de 120. Cette étrange histoire a profondément marqué la région. Des siècles après, on l’évoque encore. Et en 1965, les anciens revenaient volontiers sur cette légende, les hypothèses allaient toujours bon train, comme le montre l'archive ci-dessous.
La bête du Gévaudan
1965 - 03:05 - vidéo
Aujourd'hui encore, en se promenant dans la région, on croise toujours les traces du monstre du Gévaudan. Un plus non négligeable pour le tourisme local.
Pour aller plus loin :
Un nouvelle bête du Gévaudan ? A Valence, interview d'un agriculteur qui aurait vu une horrible bête dans le Gévaudan. (Audio, 1959)
Promenade au Mont Lozère, terre millénaire. (1965)
Midi magazine : la bête du Gévaudan. Reportage consacré à la légende de la bête du Gévaudan dont la sombre histoire est narrée à travers des documents d'archives, extraits de films, gravures et témoignages de Jean Lebré, de Jean Orlahc, de l'éthologue Gérard Ménatory et de l'auteur Hugues Ménatory. (1988)
LE TRIBUNAL DE L'IMPOSSIBLE. En 1764 dans le Gévaudan, une mystérieuse créature sanguinaire sème la terreur, dévorant des enfants. La traque est lancée pour capturer la bête. Le roi dépêche une compagnie de Dragons, mais les Lozériens se méfient d'eux. Un célèbre chasseur de loups tente aussi de capturer le monstre. Les hommes parviendront-ils à mettre fin à ce fléau ?