"Hauterives, un village de la Drôme connu dans le monde entier grâce à une construction des plus étonnantes, le palais idéal du facteur Cheval. Un édifice de 24 mètres de long, 12 mètres de haut et 14 mètres de large (1000m3, soit 3500 sacs de chaux). Une construction hallucinante, sortie tout droit du cerveau d'un facteur, qui consacra trente-trois ans de sa vie à construire ce monument au milieu de son potager."
Toujours visité, il suscite l'admiration :
"Moi qui suit un ancien compagnon charpentier, j'ai vu beaucoup de choses dans ma vie mais je suis stupéfait par ce qui a pu être créé et imaginé!"
"Entre 1879 et 1912, Joseph Ferdinand Cheval (1836-1924), facteur de son état, construit son chef d'œuvre, pierre par pierre, avec pour seul outil sa brouette !" Il ramenait aussi les pierres qu'il trouvait dans sa sacoche ou ses poches au fil de ses tournées, soit une vingtaine de kilos par jour. Architecte, sculpteur ou dessinateur, il inventera pour mener son projet à bien, certaines techniques comme le béton armé par exemple.
"C'était un grand malade mais c'est impressionnant. Il faut vraiment avoir la foi !"
En effet, le facteur s'obstinera à construire son palais pour la postérité jusqu'à 77 ans, date à laquelle il entame la construction de son tombeau qu'il achèvera à 86 ans.
Pierre Constant, restaurateur du Palais idéal depuis 30 ans ajoute : "Il travaillait jour et nuit. Beaucoup la nuit d'ailleurs. On comprend mieux le palais si on y voir le soir avec des bougies. On a la vision qu'il avait lui."
Travailleur et persévérant, il l'était. Au pays, Léon Chautemps, qui le remplaça à la poste, le décrivait ainsi en 1979 : "C'était quelqu'un de secret qui ne parlait à personne" mais c'était "un travailleur acharné."
Le projet de ce bâtisseur atypique était un peu mystique. "Il souhaitait faire de ce palais un mausolée, un bâtiment un peu délirant à la mesure de son génie." Il se construit ainsi son propre tombeau à la manière des pharaons. Il l'appelle d'ailleurs "le tombeau égyptien". Finalement, la loi l'obligera à se faire enterrer comme tout le monde au cimetière. Pendant dix ans, il peaufinera son dernier lieu de repos, un mini palais devenu aussi un lieu de pèlerinage incontournable."
"Dans la source de la vie j'ai puisé mon génie"
Au gré de la visite, apparaissent de nombreuses maximes laissées par cet homme à la fois "philosophe du bon sens, un peu déiste et parfois orgueilleux", mais également poète. Il lègue un recueil de pierres, une œuvre architecturale, inclassable et un peu ésotérique.
En 1971, Armand Lanoux, écrivain membre de l'Académie Goncourt en détaille certaines.
En 1970, Françoise Mallet Joris tente à son tour d'en déchiffrer le message. Dans cet extraordinaire décor, elle esquisse des pistes de compréhension de l'artiste, s'interroge sur le rôle et le désir d'un créateur, sa peur de ne pas être compris. Elle définit l'art comme étant "le rapport constant entre l'harmonie d'une chose que l'on créée et qui est un peu "édénique" et le fait que le monde n'est en réalité pas harmonieux et qu'on est bien forcer de le constater."
Les férus de psychanalyse y décrypteront sans doute une représentation de l'inconscient où la symbolique sexuelle est plus que suggérée. Certains y verront un médium ou un spirite comme le soulignait Armand Lanoux toujours en 1971.
Le palais idéal sera classé aux monuments historiques par André Malraux en 1969.
Pour aller plus loin
Objectif : Le palais idéal du facteur Cheval. Prolongez la visite du palais. (Reportage de 1979)
Les bonnes adresses du passé : le palais idéal. Présentation de Ferdinand Cheval dit le Facteur Cheval. Armand Lanoux, écrivain membre de l'Académie Goncourt, parle de l'énigme constituée par ce personnage.
Les bonnes adresses du passé : le palais idéal. Armand Lanoux dresse le portrait du facteur. Personnage inquiétant, homme insatisfait et fragile qui avait dans la tête un palais imaginaire. (1971)
Le facteur Cheval : où le songe devient la réalité. Documentaire de Clovis Prévost, 2001 (Premium)
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